Histoire du Château médiéval d'Oudon
Campé sur un éperon rocheux dominant la Loire, le château d'Oudon constituait au Moyen Âge une importante pièce défensive sur l'échiquier des marches de Bretagne.
Sentinelle de pierre surveillant l'Anjou, il contrôlait le trafic fluvial et, avec le château d'Ancenis, verrouillait le passage vers Nantes, capitale du duché de Bretagne.
Des textes du XIe siècle citent des seigneurs d’Oudon et signalent l’existence d’un château, installé sur les rives de la Loire et du Hâvre, à l’emplacement du château actuel. Aux marches de la Bretagne, Oudon, comme le château d’Ancenis, est plusieurs fois assiégé : notamment en 1174 par Henri II Plantagenêt qui veut annexer la Bretagne, en 1214 par Jean sans Terre, frère de Richard Coeur de Lion, en lutte contre Philippe Auguste, et en 1230 lorsque Pierre Mauclerc, Duc de Bretagne, tente de se démarquer de l’autorité du roi Louis IX (saint Louis). Ce dernier réagit par une campagne militaire en Bretagne et s'empare du château en 1230 et 1234. Ces nombreux faits de guerre démontrent l'importance stratégique du château à cette époque. De ce premier château, il ne reste qu’une partie du mur d’enceinte, comprise dans l'actuelle courtine ouest.
Origines du premier Château d'Oudon
XIe siècle
1392
La reconstruction du Château d'Oudon
Le 22 mai 1392, Alain de Malestroit, Seigneur d’Oudon, obtient de Jean IV, Duc de Bretagne, l’autorisation de reconstruire son château. Il bâtit la tour principale, ou donjon, au sein d'un ensemble fortifié.
Les deux tours qui encadrent la porte d'entrée principale étaient destinées à loger la garde du château. Elles avaient un étage supplémentaire qui a été modifié pour l'aménagement de parapets à créneaux et merlons. Les archères canonnières caractéristiques des années 1470 ont un orifice circulaire surmonté d’une fente de visée.
Le portail d’entrée, en plein cintre, a été modifié au XVIe siècle. Cette transformation ne concerne sans doute qu’une reprise des arcs et piédroits car l’aspect intérieur est bien caractéristique du milieu du XVe : un couloir voûté faisant suite à la porte charretière, une herse en fer, une deuxième porte.
Un système de deux ponts-levis à flèches pour les portes charretière et piétonne assurait en partie la défense et l'accès au château.
Pour se rendre au donjon, il fallait encore franchir une tour porte, dont on reconnaît, dans la cour, un tronçon du porche. Enfin, une passerelle escamotable permettait d'enjamber le fossé et la chemise.
La chemise est la transposition en maçonnerie des palissades de bois défendant les mottes castrales. Elle doit tenir quelque temps l'assaillant à distance de la base du donjon et empêcher les tentatives de sape.
Château d'Oudon : une tour résidence
XIVe siècle
La tour possédant son fossé, son pont et sa chemise, est à elle seule une forteresse. Mais cette architecture défensive est aussi le lieu d'habitation principal du seigneur: elle intègre des fonctions ostentatoires et résidentielles à l'instar du donjon de Vincennes bâti en 1361, et de la tour bretonne de Largoët en Elven érigée par le frère aînée Jean de Malestroit vers 1375. Chaque niveau, desservi par un large escalier à vis, comporte une grande salle qui a valeur d'espace commun, et une chambre attenante. Dans l'épaisseur des murs sont aménagés garde-robes, couloirs dérobés, salles de guet et un escalier à vis secondaire pour la distribution privative entre les étages. Chaque pièce, confortablement équipée d'une latrine et chauffée par une cheminée, est largement éclairée par de grandes baies à meneau et croisillon, agrémentées de coussièges. Le niveau par lequel on accède pouvait être destiné au service, notamment comme cuisine, car les cheminées sont très profondes. Tandis que la qualité de facture des cheminées des étages supérieurs semble en prouver l’utilisation noble. Celles du dernier étage, monumentales et décoratives, conviennent aux desseins d'apparat et de réception. Au sommet, l'aspect défensif réapparaît avec chemin de ronde, mâchicoulis, merlons et créneaux. Une chambre haute existait probablement entre les deux tourelles des escaliers (possible chapelle ou salle de garde?)
Une dernière campagne de travaux a eu lieu sur l’enceinte au XVIe siècle. Elle concerne la tour sud-ouest et son raccord avec la courtine la plus ancienne. C’est une tour d’artillerie avec plusieurs canonnières battant le fossé. Utilisées pour des armements légers, elles sont très ébrasées vers l’extérieur avec une toute petite ouverture intérieure. Les murs sont peu épais, les canonnières disposées sans logique stratégique, ce qui semble démontrer une construction hâtive.
Après une succession mouvementée, le connétable Anne de Montmorency, gouverneur de Nantes et seigneur de Châteaubriant, devient propriétaire du château de Oudon en 1560. Il a apposé ses armes, aujourd’hui presque effacées, à droite de la porte sud (actuellement murée) de la chemise. Sur son invitation, le roi Charles IX est venu dîner dans la tour en 1565.
Au XVIIe siècle, à la suite d’une trahison, le roi Louis XIV confisque les biens d’Henri de Montmorency. Le château d’Oudon revient alors à Charlotte Marguerite de Montmorency, épouse d’Henri de Bourbon, prince de Condé. Dès cette époque le château n’est plus habité et se dégrade. Décrété bien national à la Révolution, il est divisé en parcelles achetées par la population locale. C'est ainsi que, démantelé pour récupérer ses divers matériaux, les marches de l’escalier, les planchers et le toit disparaissent, et qu'il ne reste plus que les murs du donjon pour accueillir les oiseaux.
1794
La Château d'Oudon comme bien national
Lors de la Révolution, le domaine est confisqué en 1794, et devient bien national ; divisé en parcelles, il est acheté, en 1807, par des propriétaires locaux qui démantèlent des parties du château pour en récupérer les matériaux (marches des escaliers, planchers, pierres). En 1820, le conseil général de la Loire-Inférieure achète le château. Puis, après le classement comme monument historique en 1866, il le cède à l’État, en 1881. L’architecte en chef des monuments historiques, Victor Ruprich-Robert, mène des travaux de restauration de la tour (toiture, murs et fenêtres). Cette opération vise à ne pas voir l’édifice disparaître mais celui-ci va pourtant rester sans entretien pendant près d'un siècle. Des travaux sont enfin menés entre 1974 et 1984, pour consolider les murs d’enceinte et de certaines maçonneries du donjon. À partir de 1989, un projet de mise en valeur est lancé, en perspective du 600e anniversaire de la tour : l'intérieur du donjon redevient accessible par la reconstruction de l'escalier à vis et la pose de planchers aux étages. La tour est classée au titre des monuments historiques en 1866 et 1875. Le terrain, les parties d’enceinte du xve siècle, les ponts d’accès et les douves sont inscrits en 2000.